"Schlecht organisation". Cela n'a pas manqué : à peine débarqués à Lvov, les Allemands critiquent déjà les conditions d'accueil en Ukraine. Experts en logistique, ils déplorent, samedi 9 juin, les distances à parcourir (8 km en bus, puis vingt minutes à pied) pour rallier l'Arena de la capitale de la Galicie. A proximité des Carpates, ils découvrent avec stupeur l'immensité désolée de la plaine ukrainienne et ce stade surgi au milieu de nulle part, qui leur a pourtant porté chance puisque leur équipe y a battu le Portugal (1-0) pour sa première sortie dans la compétition.
Plus tôt, dans le nouvel aéroport international de Lvov, ils avaient eu aussi la surprise de constater que l'unique bureau de change n'avait dépêché qu'une pauvre employée. Mais on ne peut tout de même pas organiser systématiquement les compétitions footballistiques chez eux. Les Allemands ont déjà été bien gâtés avec deux Coupes du monde (2006 et 1974, en RFA) et un Euro (1988). De quoi se plaignent ses supporteurs ? Ils ont passé l'après-midi à siroter des bières en terrasse dans la ville la plus accueillante du pays, si esthétique avec ses "cent églises" revendiquées que son centre est inscrit au patrimoine de l'Unesco. L'ancienne Lemberg de l'empire austro-hongrois, place forte de la Révolution orange, est moins dépaysante et plus souriante que la laborieuse Donetsk, avec ses grises mines, où sont basés les Français. Et à 70 kilomètres de la frontière avec la Pologne, c'est des quatre villes-hôtes ukrainiennes la plus proche du pays.
GOMEZ EN SAUVEUR
Confiants en leur destin de co-favoris (avec l'Espagne) pour le titre, les Allemands, qui ne sauraient avoir d'autre objectif que le triomphe, ont oublié ces légers désagréments en savourant d'abord la défaite de l'ennemi héréditaire néerlandais, piégé à la surprise générale par le Danemark. "Le groupe de la mort" l'est encore un peu plus si les Scandinaves jouent les trouble-fête.
Et Lvov, de son côté, peut jubiler, qui a hérité non seulement du premier choc de cet Euro, mais de deux autres matches de cette poule. Dans une enceinte pleine (33 000 spectateurs) et acquise à la Mannschaft, avec de gais chanteurs venus de Lübeck, Bochum, Hanovre, Munich, Erfurt ou Berlin, l'équipe nationale a évolué comme à domicile, la poche de résistance lusitanienne, massée dans un virage, ne pouvant rivaliser avec les huées dès que les hommes de Paulo Bento touchaient le ballon.
Les protégés de Joachim Löw ont pris d'emblée le match à leur compte, entreprenants et dynamiques grâce à leur trident offensif, Podolski-Gomez-Müller, soutenus par Özil, désigné officiellement homme du match. L'opposition de styles promise entre un collectif remarquablement huilé et aux transmissions fluides côté allemand et, côté portugais, un agrégat d'individualités qui semble remettre son efficacité offensive entre les pieds dorés du seul Cristiano Ronaldo, a été gâchée par la nervosité et la rugosité des interventions.
MOURINHO EXASPÉRÉ EN TRIBUNE
Les Portugais ont pourtant causé d'énormes frayeurs au public avec cette frappe de Pepe (44e) expédiée dans la lucarne droite de Manuel Neuer. Le ballon a heurté le montant avant de rebondir sur la ligne de but. Plus tard, Jérôme Boateng s'est illustré en empêchant in extremis Ronaldo d'armer dans la surface de réparation (65e). L'ouverture du score de la tête par Mario Gomez (72e), après un centre dévié par la défense portugaise a donc été accueillie avec soulagement.
Le speaker ukrainien a invité la foule à scander le nom du buteur du Bayern Münich, qui a cédé sa place pour les dix dernières minutes à Miroslav Klose, un indicateur des réserves dont dispose Löw dans son effectif. Décidés à ne pas subir la même déconvenue que les Pays-Bas, les Portugais ont bien été obligés de réagir. Ils ont fait trembler leurs adversaires jusqu'au bout, avec un centre-tir de Nani, mal jugé par Neuer, heurtant le haut de la barre transversale.
A deux minutes de la fin du temps réglementaire, le remplaçant Silvestre Varela s'est retrouvé seul face au gardien du Bayern mais son tir mou a buté sur le corps déployé de son opposant. L'entraîneur du Real Madrid, José Mourinho, était exaspéré en tribune. Un peu plus quand un tir de Nani, dans les ultimes secondes, a été contrarié par le dos de Badstuber. Les Allemands s'en sortent finalement bien. Ce score étriqué mais idéal pour débuter devrait renforcer leur confiance, s'il en était besoin. Au bonheur de voir Cristiano Ronaldo regagner immédiatement les vestiaires au coup de sifflet final s'ajoute celui de pouvoir bouter les Néerlandais de la compétition dès le 13 juin à Kharkov. Avant de revenir à Lvov quatre jours plus tard pour se mesurer aux Danois. Une charmante cité où ils ont déjà pris de bonnes habitudes.
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